Bandeau 20 ans Barroco

jeudi 6 mars 2014

Insubmersion, le scénario



Nous avons le plaisir d'inaugurer ce blog, carnet de voyage du navire Sortez de chez vous!, avec le scénario du court-métrage Insubmersion, réalisé du 21 au 23 février 2014 par Matthieu Marzo, prise de son et musique par Maxime Lennoz, avec Laurent Priou, Nathalie Jayet et Rodolphe Couthouis.
Ce film a été produit dans les mêmes conditions que celles du 48 Hour Film Project, un concours où un court-métrage doit être entièrement conçu en 48 heures chrono sous contraintes. Matthieu Marzo et son équipe représenteront SDCV! à l'édition tourangelle de ce même concours, du 4 au 6 avril 2014.
Voici les éléments qui furent imposés :
  • Réplique : « Vous ne l'avez pas volé, seulement emprunté... »
  • Personnage : William, chanteur de blues
  • Objet : Un levier
  • Genre : Science-Fiction

Insubmersion
Scénario de Nordine Merniz

Scène 1 - INT/SOIR – Dans la salle à manger chez William et Gabrielle
William et Gabrielle dînent, sans un mot, paisiblement.
Gabrielle se décide à poser la question qui la taraude.

Gabrielle – Tu as eu les résultats de l'examen ?

William prend le temps de ne pas répondre.

Gabrielle – Ça continue d'empirer ?

Un temps.

William – Finalement, il me reste que deux mois. Il prend une inspiration sonore par le nez et découpe sa viande pour continuer à vivre Ça s’accélère, et ils savent pas pourquoi. Il porte un morceau de viande à sa bouche et continue de parler en mâchant. Le médecin m'a recommandé d'annuler tous les concerts au-delà de cette date. Même si je suis encore là, je ne serai plus en état de chanter. Il baisse les yeux. Ils pourront toujours écouter les enregistrements.

Un temps.

Gabrielle – J'ai quelque chose d'important à te dire. J'ai vu Pierre aujourd'hui.

William s'arrête net de respirer et lève son regard de son assiette – Qu'est-ce qu'i' te voulait ?

Gabrielle – C'est moi qui ai demandée à le voir.


Scène 2 – INT/JOUR – Dans un café
Gabrielle attend, un verre sur la table. Elle n'a trouvée que le vide pour supporter le poids de son regard chargé d'un sentiment insoutenable.
Pierre arrive et s'installe à la même table. Après un temps où Gabrielle ne sort pas de son silence.

Pierre – Je suis ravi que tu aies demandée à me voir. Comment ça va ?

Gabrielle, distante – Je vais bien. Merci.

Pierre – Et lui ?

Gabrielle ne répond pas.
Pierre croit comprendre.

Pierre – Tout va bien de mon côté. On a mené une belle opération avec un partenaire en Amérique du Sud. Les choses se passent bien. Et en plus, tu me demandes de te voir. Ça devient difficile d’espérer mieux.

Gabrielle – William est mourant.

Pierre cherche ses mots – Je suis vraiment désolé. Si je peux faire quelque chose pour toi, tu peux tout me demander.

Gabrielle relève légèrement la tête à ses mots.

Gabrielle – Tu fais toujours des injections de Selfkar ?

Pierre – Oui, ça me coûte une petite fortune mais oui, forcement. Et je suis toujours prêt à te les offrir Il fait un lapsus une fois que William...

Gabrielle – Est-ce que tu n'as jamais eu l'impression que cet argent, pour tes injections, tu le voles à des pauvres gens ? Est-ce que tu n'as jamais eu l'impression qu'à chaque fois que tu vas dans ces laboratoires, c'est la vie de ces gens que tu t'injectes pour vivre éternellement ? Elle respire et cherche la réponse dans les yeux de Pierre. Cette question me hante depuis trop longtemps.

Pierre – C'est pour ça que tu as demandée à ce qu'on se voit ?

Gabrielle – Est-ce que c'est à ça que tu penses, est-ce que tu y penses à ces gens ?

Pierre – Cet argent, il ne nous ait pas donné. Et ne nous le volons pas si c'est ce que tu sous-entends. Nous vendons des biens que ces gens font le choix d'acheter. Parce que tu crois que c'est facile de vivre en ayant en tête ces milliards de personnes qui peuvent mourir.

Gabrielle – Bon. Vous ne leur avez pas volé, vous leur avez seulement emprunté...

Pierre – Non, Gabrielle. On ne l'emprunte pas, on le gagne c'est tout. Et ceux qui nous injectent le gagnent à nouveau. C'est comme ça. Tout le monde le sait et est libre de faire ce qu'il veut avec ça.

Gabrielle – Et la mort instantanée qui t'attend si tu manques une seule journée d'injection. C'est ça ta liberté ?

Pierre – Je savais où je m'engageais quand je l'ai fait. Et je ne veux pas mourir, mais je ne veux pas vivre en sachant que toi, tu vas mourir. J'ai accepté l'idée que je ne t'aurai jamais près de moi. Mais je ne me ferai jamais à l'idée que tu ne puisses plus être là... du tout.

Gabrielle – J'aime William. Je sais ce que tu ressens pour moi mais c'est lui que j'aime, vraiment. Et tu le sais. Offre-lui les injections et j'accepterai de les recevoir de toi. Si tu m'aimes, tu le feras. Si tu m'aimes vraiment.

Un temps

Pierre – On peut arriver à l'injection de 16 heures si on part maintenant. Je t'emmène.


Scène 3 - INT/SOIR – Dans la salle à manger chez William et Gabrielle

William – Et tu l'as fait ?

Entre-scène :
Gros plan sur un levier de vitesse qui passe la première.

Gabrielle – Oui. Souriante On a pris un rendez-vous pour toi, demain à 10h.

Un temps

William – J'en veux pas.

Fin


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